Crise sanitaire : les établissements se préparent à de multiples changements

Coronavirus
Avec la pandémie de Covid-19, les établissements d’enseignement supérieur ont fait face à une situation inédite. Dès le 17 mars, ils ont dû s’adapter très vite pour assurer la continuité pédagogique dans un contexte de confinement national. Mais la crise sanitaire risque de durer. Comment les responsables des écoles et des universités envisagent-ils le futur ? Leur point de vue.

Cours magistraux, amphithéâtres bondés, études et stages à l’étranger… l’épidémie de coronavirus place les établissements d’enseignement supérieur face à de multiples incertitudes. Comment vont-ils proposer le même niveau de formation aux étudiants ? Quelle place auront les échanges internationaux dans les programmes ? Les contenus vont-ils évoluer ? La crise sanitaire devrait affecter l’organisation des formations à de multiples niveaux.

Le développement des cours en ligne

Révolution numérique oblige, de nombreux établissements avaient mis en place des systèmes permettant l’apprentissage à distance. Mais lorsque le pays s’est retrouvé totalement confiné, il a fallu proposer l’ensemble des enseignements en ligne.

« Nous avons dû réagir dans l’urgence pour organiser les cours et les examens à distance. Nous utilisions déjà la plateforme Moodle, un outil qui a prouvé sa fiabilité, témoigne Yves Déloye, directeur de Sciences po Bordeaux. Nous nous préparons à de nouvelles phases de confinement et réfléchissons aux modalités d’hybridation des cours avec des séquences basculées à distance. »

Cette crise nous oblige à développer des modes de fonctionnement alternatif. (P. Bénech)

Si la crise sanitaire se prolonge, les cours accueillant plusieurs centaines d’élèves ne pourront pas répondre aux règles de distanciation sociale. Pouvoir accéder aux mêmes cours derrière un ordinateur permettra d’éviter les risques de contamination. « Néanmoins, on ne prépare pas un enseignement en présentiel comme un cours à distance. Il ne s’agit pas de mettre en ligne des fichiers PDF mais de concevoir d’autres façons d’enseigner », souligne Yves Déloye.

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Enseigner autrement

Pour que l’enseignement à distance soit efficace, les établissements réfléchissent à de nouvelles formes de cours et privilégient l’approche multimédia associant du texte, des vidéos, des tchats, des visioconférences, des séquences différées, du direct… « Cette crise nous oblige à développer des modes de fonctionnement alternatifs. Or, ce n’est pas la même chose de concevoir quelques cours en ligne en fin d’année que de proposer toute une année d’enseignement à distance. C’est un changement sociétal pour notre métier qui est en train de se jouer », analyse Pierre Bénech, administrateur général de Grenoble INP.

Cette crise va nous amener à revoir la manière dont les sciences se positionneront vis-à-vis du politique. (V. Laflèche, Mines ParisTech)

L’Université de Haute-Alsace travaille déjà à la transformation de ses cursus de formation avec son projet Elan, lauréat d’un appel à projets. Cette transformation repose notamment sur la modularisation et l’a-synchronisation des cours. « Nous devons être en mesure de proposer une offre de formation souple, capables de s’adapter à tout type de situation, estime Dominique Meyer-Bolzinger, vice-présidente de l’Université de Haute-Alsace. J’ai lancé des états généraux afin de mener une réflexion sur les bénéfices que l’on peut tirer de cette crise. »

De nouveaux contenus

Parce qu’elle bouscule en profondeur nos habitudes, le système économique mondial, le fonctionnement des entreprises et le rôle des Etats, la crise aura également à moyen terme un impact sur les contenus des formations.

A l’école des Mines ParisTech une réflexion est lancée sur l’évolution des cursus proposés. « Nous souhaitons développer de nouveaux enseignements sur la résilience des organisations et la capacité à décider avec de l’incertitude, explique Vincent Laflèche, son directeur. Nous menons également des réflexions sur le rôle du scientifique dans le débat public. Nous avons la certitude que cette crise va nous amener à revoir la manière dont les sciences se positionneront vis-à-vis du politique.« 

Moins d’échanges internationaux ?

Fermeture des frontières, avions cloués au sol, professeurs et étudiants confinés… A l’heure où les établissements français se tournaient de plus en plus vers l’international, le virus a mis entre parenthèses les possibilités de stages et d’études à l’étranger. Comment dans ce contexte envisager le futur ? La crise sanitaire aura-t-elle raison de la mondialisation de l’enseignement ?

A Toulouse Business School, la crise sanitaire met en suspens l’international qui est une dimension importante du modèle économique avec 25% d’étudiants étrangers et 215 universités partenaires dans le monde. « Pour l’instant, nous naviguons à vue. Nous sommes capables de proposer l’ensemble de nos enseignements à distance, mais la raison d’être d’un cursus intégrant l’international, c’est de passer une année à l’étranger, de faire une expérience de vie, de découvrir un autre modèle éducatif, de décrocher un stage ou un emploi sur place », estime Stéphanie Lavigne, directrice générale de l’école de commerce toulousaine.

La raison d’être d’un cursus intégrant l’international, c’est de passer une année à l’étranger, de faire une expérience de vie… (S. Lavigne)

Difficile en effet d’envisager un retour en arrière à l’heure où la planète est devenue un grand village… Néanmoins, de l’avis de tous, cette crise sanitaire doit mener les établissements à une réflexion sur leur impact écologique. Chacun réfléchit à un mode de fonctionnement plus sobre et prédit dans les mois à venir le développement des visioconférences, du télétravail, de nouveaux aménagements de locaux ou des séjours internationaux plus courts et plus ciblés

(Source l’étudiant)